Monter un VTT de voyage en 2022 / Chap.2 : les composants

Monter un VTT de voyage en 2022 / Chap.2 : les composants
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Une fois reçu le cadre de mon nouveau VTT de voyage, restait à réunir un jeu complet de composants. Opération délicate, en ces temps de pénuries en tous genres.

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J’avais donc entre mes mains ce cadre Big Bro de chez Brother Cycles, qui répondait à l’essentiel de mes critères de géométrie et de compatibilité. Il s’agissait d’un VTT moderne, privilégiant le transport de bagages plutôt que les prouesses acrobatiques. En raison du Brexit, son acquisition m’avait coûté plus cher que prévu ; en raison du Covid, j’avais dû patienter six mois avant de le recevoir. (Voir chapitre 1.)

Pour son montage, je souhaitais évidemment poursuivre dans la logique qui m’avait fait choisir le cadre. Je voulais des composants fiables, que je sois en mesure de réparer, et qui m’apportent tout le confort et la commodité chers au voyageur.

Monter un VTT de voyage en 2022 / Chap.2 : les composants

Les roues

Les roues ont été le sujet le plus épineux de la sélection. Entre les questions de compatibilité (avec le cadre aussi bien qu’avec la transmission et les pneus qui m’intéressaient), les questions de disponibilité et celles de budget, les contraintes étaient pesantes.

Ne parvenant pas à concilier toutes mes exigences, il a fallu que je renonce à certaines. En particulier, au lieu des 32 rayons qui me semblaient un minimum, j’ai finalement dû me contenter de 28, ce qui pourrait s’avérer un peu fragile dans certaines conditions de charge, sur terrains difficiles.
Peut-être aurais-je dû me faire assembler par un professionnel une paire de roues à la carte. Je craignais que mon budget ne soit trop serré pour ça. Peut-être aurais-je dû rayonner moi-même les roues. Ne m’y étant jamais essayé, je craignais de ne pas être à la hauteur.

Mais malgré quelques concessions, et contre la règle qui veut qu’en voyage on favorise les vieux standards, je me sens rassuré sur le long terme d’avoir opté pour des axes traversants et le format Boost. Car mes recherches m’ont fait constater à quel point ce format s’est instauré. Quand on trouve des produits autres, ils sont souvent de moindre qualité.

Pour un budget presque 100€ en-dessous de la limite que je m’étais fixée, j’ai finalement opté pour des roues complètes de chez DT Swiss : le modèle E-1900 SPLINE 30mm, en 27,5”.

Bien que j’aie pu lire sur internet de bons retours à leur propos, j’ai réalisé depuis que d’autres modèles potentiellement plus intéressants pouvaient se trouver à bon prix sur le marché de l’occasion. Si c’était à refaire, je crois que je privilégierais cette option.

Les pneus

À ma connaissance, aucun pneu de grand volume (2,4“ et plus) n’offre une protection ni une durabilité comparables à celles de références comme les Schwalbe Marathon ou autres classiques du voyage. Le tubeless est brandi de toute part comme la solution aux problèmes de crevaisons. La durée de vie est presque disparue des arguments commerciaux.

Voilà qui n’est pas très arrangeant pour les voyageurs. La réparation d’un pneu tubeless sur le bord d’un chemin perdu est une entreprise hasardeuse. Sans l’aide d’un compresseur ou au moins d’une pompe d’atelier, les espoirs sont minces de parvenir à faire claquer le pneu.
Insérer des chambres à air dans des pneus tubeless ne constitue pas non plus une véritable solution, ni en montage initial (on perd les atouts anti-crevaison), ni en réparation (un tubeless crevé a toutes les chances d’être déjà truffé d’épines).

Ces considérations mises à part, j’espère et je crois avoir trouvé dans une paire de Schwalbe Nobby Nick 27,5×2,6” des pneus à la fois capables d’accrocher des sols fuyants, de rouler néanmoins convenablement sur l’asphalte, de m’apporter un bon amorti, et de me prémunir contre bon nombre de crevaisons.

La transmission

J’ai beaucoup hésité sur ce sujet. Les transmissions à triple plateau et leurs chaînes encore assez robustes sont reléguées d’année en année vers le bas de gamme. Le mono-plateau s’impose, et s’il a l’avantage de simplifier grandement la portion avant de la mécanique, pour l’arrière il pousse en revanche vers du matériel de haute précision, plus fragile et plus délicat à ajuster.

Pour des questions de disponibilité internationale et de compatibilité (en cas de panne à l’étranger), j’ai préféré écarter le groupe AdventX de microSHIFT (1×10 vitesses), qui aurait constitué un bon compromis entre modernité et simplicité.

Chez Shimano, j’ai beaucoup hésité entre 11 vitesses (même corps de roue libre que les groupes à 9 et 10 vitesses) et 12 vitesses (roue libre au nouveau format MicroSpline). Pour avoir lu que les groupes 12 vitesses étaient les plus fiables (contre toute attente), et me doutant bien que l’industrie privilégiera dorénavant le nouveau standard, j’ai opté finalement pour un groupe à 12 vitesses.

Mais pour m’assurer que cette mécanique de haute précision fonctionne au mieux, j’ai consenti à l’effort financier de prendre la manette et le dérailleur dans la gamme XT. Je pensais me contenter du Deore pour les pièces d’usure, mais à part le pédalier, impossible d’en trouver ! Si j’ai pu pour un surcoût mineur basculer sur une chaîne SLX, la cassette s’est révélée un problème bien plus ennuyeux. De toutes les boutiques de proximité et de tous les revendeurs en ligne que j’ai consultés, je n’ai pu trouver de cassette adaptée que dans la gamme de compétition XTR. À 350€ la cassette, j’étais un peu refroidi…
C’est finalement sur troc-velo.com que j’ai fini par trouver une cassette XT neuve vendue d’occasion. Il s’en est fallu de peu que je roule en draisienne !

Ma transmission m’aura donc coûté pas mal plus cher que prévu, mais ces composants se montrent pour le moment d’une qualité épatante, et d’aucuns prétendent qu’ils sont également très durables.

Freins

Bien que dans l’ensemble j’ai voulu ce vélo conforme à la plupart des nouveaux standards, sur la question des freins j’ai préféré une position plus conservatrice (c’est-à-dire pas hydraulique).
Initialement emballé par les freins hybrides, qui concilient les avantages des systèmes hydrauliques (puissance et modulation) et des systèmes mécaniques (facilité d’entretien et de réparation), j’aurais volontiers fait l’acquisition d’une paire de Juin Tech M1. Hélas, là encore, impossible de s’en procurer.
À défaut j’avais estimé que les freins mécaniques Spyke de chez TRP auraient été une autre valeur sûre. En rupture également…
J’ai donc fini par adopter un autre classique, les Avid BB7, dont le fonctionnement est aussi fiable, mais pour lesquels il pourrait parfois être plus délicat de trouver des plaquettes de rechange.

Concernant les disques, j’ai préféré des diamètres de 160mm, qui n’offriront peut-être pas le freinage le plus efficace, mais présentent moins de risques de voilage. Mes roues DT Swiss, pourvues d’interfaces Shimano CenterLock, étaient livrés avec des adaptateurs six trous : une combinaison qui me plaît bien, pour l’adaptabilité qu’elle permet.
Les leviers de freins sont une des quelques pièces pour lesquelles j’ai pu réutiliser du vieux matériel dont je disposais déjà.

Autres

Je passerai plus rapidement sur d’autres pièces, qui m’ont posé moins de difficultés.

Au guidon, il n’a heureusement pas été compliqué de me procurer une potence ; et j’ai pu trouver un cintre économique correspondant assez bien à mes exigences. Avec sa réhausse de 4cm toutefois, je trouve ma position un peu trop haute. J’ai donc rabaissé la potence, mais je me sens un peu réticent à réduire d’autant la longueur de mon tube de fourche, qui dépasse maintenant de façon peu esthétique. (Dilemme !)
J’ai réemployé les cornes (Decathlon) et poignées (Ergon GA3) dont je ne devrais plus me servir sur mon vieux vélo, dorénavant monté avec un cintre gravel (pour plus de contraste avec ma nouvelle monture).

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Mes pédales, plates et larges, un peu lourdes, mais d’une qualité de roulements incroyable, sont également des pièces de réemploi.
Si j’ai rapidement constaté que sans garde-boue la vie serait plus compliquée, je n’ai adopté pour le moment qu’une solution temporaire, avec à l’avant un équipement premier prix (3€ !) de chez Decathlon, et à l’arrière un modèle moyennement adaptée qui trainait dans mon atelier. C’est déjà beaucoup mieux que de ne rien avoir.

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Concernant la selle, j’ai retrouvé dans les méandres de l’atelier une selle quelconque dont j’ai oublié la provenance. Combinée avec la tige suspendue Cane Creek Thudbuster dont je ne me servais plus, elle me procure un confort adapté. Seules me font défaut les qualités d’évacuation de la transpiration auxquelles le cuir de ma Brooks m’a habitué…
(La Brooks C17 qui apparaît sur certaines photos m’a été prêtée pour un essai. Elle est confortable pour le voyage, mais peut-être un peu large pour du VTT sportif.)

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Avec un adaptateur Tubus orienté à l’envers, j’ai pu monter mon porte-bagages Cargo sans interférences avec l’étrier du frein arrière. À l’avant, j’envisage un Commuter Front de chez Pelago. Pour l’essentiel, je pense utiliser sur ce vélo les bagages dont je dispose déjà. Il n’y a que la sacoche de cadre que je pense remplacer, en m’en confectionnant une nouvelle sur-mesures.

Côté roulements, j’ai opté à la direction pour un classique Cane Creek Forty, et au boîtier de pédalier pour un Shimano XT (BB-MT800), que j’espère plus durable que le Deore (SM-BB52).

Les leçons que j’en tire

Il est un peu tôt encore pour livrer mes impressions sur ce nouveau vélo, son montage, ou même telle ou telle pièce en particulier. Si pour le moment mon ressenti est très positif, j’attendrai d’avoir roulé davantage, dans des circonstances diverses, pour étayer mes avis.

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Sur l’expérience de se monter par les temps qui courent un vélo à la carte, je crois en revanche avoir parcouru maintenant l’essentiel du chemin.

Bien qu’un plus large panel de cadres existe aujourd’hui, constituer un VTT de voyage est peut-être devenu plus compliqué qu’il y a quelques années. En peu de temps, des standards ont conquis le marché, que les pays en développement n’auront assurément pas eu le temps d’assimiler, et qui hélas ne favorisent pas toujours la durabilité ou la maintenance. Cependant, bien qu’il soit communément admis chez les voyageurs que des formats tels les roues de 26 pouces, les transmissions à 9 vitesses, ou les freins v-brake soient plus abondamment disponibles à travers le monde, la piètre qualité des pièces que l’on trouve dans les secteurs les moins développés ne permet pas d’opérer des remplacement sérieux sur des vélos de voyage. Combien de fois ai-je lu sur un blog que tel ou tel voyageur avait dû se faire livrer depuis son pays d’origine une roue, des pneus, un porte-bagages… Quant aux boutiques de qualité qu’on trouve dans les grandes métropoles, elles seraient bien en peine de proposer des formats devenus obsolètes, puisque l’industrie ne les produit plus.
L’avènement de nouveaux standards ne me semble donc finalement pas compliquer tant que ça les questions de réparation, qui ont toujours été épineuses.

Monter un VTT de voyage en 2022 / Chap.2 : les composants

En 2022, le sujet de la disponibilité des composants me semble un frein bien plus problématique. Si je devais effectuer un nouveau montage dans la foulée de celui-ci, il me serait impossible d’envisager une transmission Shimano 1×12 vitesses. On a vu que pour plusieurs composants j’ai dû trouver des solutions de replis, lesquelles se raréfient peu à peu également. Il y a peu, je remarquais que Musette – une des rares boutiques en France à offrir des montages sur la base de cadres Big Bro – proposait finalement de vendre les cadres à nu : une formule normalement moins excitante et moins lucrative pour un vélociste, à laquelle les pénuries diverses les ont sans doute contraints. Divers fabricants de vélos complets préviennent également sur leurs sites internet que les montages finaux pourraient différer sensiblement de ceux annoncés dans les supports promotionnels initiaux.
À titre personnel, j’ai l’impression d’avoir eu in extremis l’occasion d’assembler un vélo de pièces neuves. Ceux qui viendront après moi devront sans doute consentir à davantage de dépenses, davantage d’alternatives, davantage de renoncements ; d’autant qu’à la conjecture à laquelle j’ai fait face vient maintenant s’ajouter celle de la guerre en Ukraine. Les experts en tous genres avançant comme à l’accoutumée des avis contradictoires, il me paraît impossible de savoir jusqu’à quand dureront ces circonstances, et quelles transformations pourrait adopter le marché du vélo quand la crise sera derrière nous.

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À qui souhaiterait s’équiper sans tarder d’un vélo de voyage, je n’oserais plus recommander un montage à la carte. Je préconiserais plutôt de guetter les réapprovisionnements de montages complets, et de se résoudre à adopter un vélo qui ne sera pas tout à fait celui qu’on aurait rêvé.
Car au fond nombre de voyageurs ont parcouru nombre de chemins sur des vélos moyennement adaptés. Les vélos les mieux conçus ont d’ailleurs eux aussi leurs limites. Les meilleurs souvenirs de voyages sont souvent ceux dans lesquels on a dû affronter les situations les plus improbables, relever les défis les plus osés.

Si le vélo est un moyen de locomotion exceptionnel, il n’est pas en lui-même ce qui meut le voyageur. Quelque chose de plus profond l’inspire et lui donne l’énergie d’avancer.

Monter un VTT de voyage en 2022 / Chap.2 : les composantsMarc, si tu lis ces lignes, sache qu’avec ton vélo déglingos, tes sacoches en bidons découpés et tes chaussettes dépareillées, tu es devenu une référence pour moi !

Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse.

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Après cinq ans passés au Proche-Orient et en Amérique Centrale, je suis venu au vélo par intérêt pour le voyage. D’abord un tour en ma Bretagne natale, puis quelques équipées sur des terrains plus relevés, et bientôt je partais pour six mois de route entre Asie du Sud-Est et Asie Centrale.
Il m’est difficile à présent de concevoir un voyage sur un autre mode ; et pour toutes mes vacances ou presque, ainsi qu’un certain nombre de mes week-ends, je charge le matériel de camping pour une échappée vélocipédique au grand air, au pas de ma porte ou au bout du monde.

Informaticien à mes heures perdues, je suis également le développeur-éditeur-modérateur-dictateur de ce site, et du planificateur de voyages Talaria.

Enfin, ma dernière lubie en date est de fabriquer des vélos sur mesure.

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