Virée printanière dans le Quercy

Virée printanière dans le Quercy
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Vacances de Pâques 2022. Tout semblait s’opposer à ce qu’on entreprenne cette échappée cycliste.

Au boulot déjà, bien que ces vacances avaient été actées à l’avance, on me redemandait : “Tu es sûr ?” (Ben oui, je suis sûr !) Nathalie pour sa part avait dû ramener beaucoup de travail à la maison, et faisait de son mieux pour que cela n’empiète pas sur le temps qu’on voulait consacrer au vélo.
Il y a eu aussi les choucas, qui ont décidé de nicher dans la cheminée, y déversant chaque jour une montagne de branchages. Il a fallu en urgence se procurer une grande échelle et monter sur le toit pour grillager le conduit.
Et puis il y avait encore ces visites qu’on devait nous rendre et dont on était très heureux, mais qui tombaient sur des dates peu pratiques, hachurant le temps de nos vacances, pour nous contraindre à rester sur place à attendre les uns puis les autres.
Si bien qu’un soir on s’est dit “Zut, on reprend notre programme en mains !” Le lendemain on chargeait les vélos dans le coffre, et on prenait la route du Lot.

Ni l’un ni l’autre on n’avait une idée très claire de ce qu’on trouverait là. J’avais établi le tracé d’une boucle sur la carte, qui s’inscrivait dans les limites du Parc naturel régional du Quercy. C’est à peine si on avait consulté quelques images sur internet. On savait juste qu’un ami y passait parfois des vacances en famille, et que les lieux lui plaisaient. Point.

Toute cette route en voiture pour une si mince expédition à vélo : quel investissement ! C’est sans doute le prix à payer pour des Bretons qui cherchent un peu de dépaysement et veulent s’assurer une météo clémente. Passé la Loire, le thermomètre gagne déjà quelques degrés, et les tuiles sur les toits apportent un premier parfum de voyage. Mais c’est en approchant de la destination finale, tandis que les routes, diminuant de largeur, commencent à sillonner une campagne préservée, qu’on se dit avoir fait un très beau choix.

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Pour notre arrivée dans le pays, on se pose dans un camping à la ferme, près de Gramat ; c’est aussi là qu’on laissera la voiture pour les jours à venir. Et hop, le matin suivant, on enfourche nos montures.

On était venus dans le Quercy en espérant y trouver de beaux paysages. Ce sont d’abord les constructions qui nous frappent. Le bâti rural est magnifique. Des bâtisses de pierre calcaire, dont les pignons rompus sont surmontés d’une courte croupe : simple et élégant. La tuile sied parfaitement à ces formes. L’habitat est épars. Les constructions récentes sont en minorité, et le patrimoine ancien est entretenu et habité dans l’ensemble.

Durant cette première matinée de route, on s’émerveille aussi du printemps qui se répand dans les prés du causse. La campagne consiste essentiellement en des pâtures sur lesquelles de nombreux arbres ont été préservés, sans doute pour fournir un ombrage aux bêtes. L’herbe et les premières feuilles des arbres – qu’on croirait voir se déployer lentement sous nos yeux – sont d’un vert clair qui témoignent de leur pousse toute récente.

À Assier, on s’installe pour pique-niquer au pied d’un somptueux château dont le maître – qui joua un rôle décisif dans la bataille de 1515 à Marignan – fait la fierté locale.

Notre parcours emprunte pour l’essentiel de petites routes, mais j’avais aussi prévu des passages sur des chemins de terre. Hélas ceux-ci ne s’avèrent finalement pas plus intéressants que le tarmac. Ils traversent des secteurs embroussaillés qui ne nous permettent pas d’admirer le paysage. Certains sont aussi plus rocailleux que je n’aurais cru. Maintenant qu’on s’est équipés de VTTs (pour d’autres projets) on a moins le goût de se faire secouer sur les vieux vélos de rando avec lesquels on est partis.
Je révise donc l’itinéraire pour coller davantage aux routes communales qui sillonnent la campagne. On croirait parfois en être les seuls usagers tant les voitures y sont rares ! La fluidité que procure le tarmac s’accorde assez bien avec la douceur du printemps. Mais bientôt nous quittons le plateau du causse Gramat, et le relief redonne une dimension plus sportive à nos pérégrinations.

La principale contrainte dans le Quercy, pour de petits rouleurs comme nous, c’est celle du ravitaillement. Si on trouve assez facilement des moyens de recharger les bidons, faire les courses nécessite un peu plus d’organisation et d’adaptation. C’est la contrepartie d’une campagne aussi préservée : les commerces sont rares. On compose donc avec les opportunités de remplir les sacoches, tantôt chargeant davantage de provisions, tantôt allongeant l’étape en quête d’une épicerie. Les marchés et ventes à la ferme qu’on voit fléchés ici et là sur les panneaux sont sans doute une belle alternative pour les locaux, mais une option peu commode en itinérance cycliste.

Au second jour on cumule pas mal de dénivelé, passant sur le Causse de Saint-Chels puis celui de Limogne, via les vallées du Célé et du Lot. Subtilement, le paysage adopte des caractères plus méridionaux, avec davantage de buissons et un sol plus sec. Mon œil de charpentier note que les constructions prennent aussi l’accent du sud, avec des toitures moins pentues et inclinées sur un unique versant. Outre les fermes anciennes, la route est parsemée de châteaux et demeures grandioses d’époques diverses. Les pavillons de quartiers résidentiels sont également plus nombreux par ici. Le Lot et sa vallée large et fertile semblent avoir été de tous temps plus propice à l’urbanisation.

Pour la deuxième nuit consécutive, on pensait poser la tente dans un camping qui finalement n’existe plus. Qu’à cela ne tienne : les charmes du bivouac pallient très bien au confort du camping.
On fait la pause de notre dîner près d’un point d’eau (le cimetière situé en face du camping disparu), et on reprend la route après manger. C’est très rare qu’on se remette en marche après dîner. Je n’ignore pas que beaucoup de cyclistes font ça – notamment ceux qui parcourent de grandes distances quotidiennes – mais pour nous je me demande si ce n’est pas la première fois… Habituellement, quand on sort la marmite, on plante la tente du même coup. Pourtant cette alternative n’est pas sans certains avantages : elle nous évite d’avoir à provisionner trop d’eau pour le bivouac, et nous permet de profiter d’heures plus tardives sur la route, qui apportent des lumières douces et une ambiance sereine.
Quelques kilomètres gagnés sur le programme du lendemain nous permettent de nous rapprocher de Cahors, où on doit être avant midi pour faire nos courses du dimanche et du lundi de Pâques.

Cette nuit est sans doute plus fraîche encore que les précédentes. On a dû frôler le gel. N’ayant pas emporté avec moi un duvet suffisamment chaud, ma première nuit dans le Quercy n’avait pas été des plus confortables. Je dors depuis avec une polaire, un legging de laine et une paire de chaussettes ; ce qui ne m’empêche pas néanmoins de ressentir la fraîcheur de l’aube...
Mais avec le lever du soleil les températures remontent rapidement, et on profite en journée d’une chaleur idéale, oscillant entre 20 et 25°, avec un superbe ciel bleu.

Alors qu’on s’attendait à voir régulièrement des vignobles sur notre parcours, ce n’est qu’en descendant sur Cahors qu’on finit par en trouver. Mais c’est la ville elle-même qui nous donne le plus de réjouissances. Encerclée presque comme une île par les ondulations du Lot, elle a conservé à travers les siècles un magnifique patrimoine architectural. On déambule dans ses ruelles, admirant les maisons à pans de bois, la cathédrale et autres monuments remarquables.
On ne s’éternise pourtant pas, et admirant la ville depuis l’autre rive du Lot, je la découvre plus étendue que je n’aurais cru, et apparemment encore richement pourvue de constructions anciennes sur ces portions qui se dévoilent. Je me dis un instant que nous aurions peut-être dû nous y attarder davantage. Mais bientôt la route nous offre d’autres délectations qui font passer les regrets.

On remonte la rivière tout l’après-midi : une promenade facile et plaisante, mais sans stimulations majeures.
Le relief, voilà encore et toujours ce qui nous épate ! Mon esprit est ailleurs, appelé déjà par nos projets de l’été dans les Andes, qui me font paraître monotone cette imperceptible ascension, et regretter que la vue ne porte pas plus loin.
La fin de la journée nous fournit néanmoins l’occasion d’emprunter un chemin de halage taillé dans la roche (sur lequel on zigzague entre les touristes), puis de découvrir l’épatant village de Saint-Cirq-Lapopie, dont les ruelles en pente sont si bien préservées depuis le XIVè siècle.

Cette nuit on fait halte dans un camping quatre étoiles atypique : au lieu de la piscine et des bungalows tout confort, ce qui semble caractériser ce lieu ce sont le calme et la propreté. Je profite de cet arrêt pour recharger notre matériel électronique. Malgré les commodités du moyeu dynamo, la charge des batteries devenait limite. Avec le temps qu’il fait, je regrette de n’avoir pas emporté pour l’essai notre nouveau panneau solaire, sur lequel on compte pour cet été.
Dans cet endroit serein, je passe paradoxalement une mauvaise nuit : trop excité par notre prochain voyage et des idées pour Les Vélos Migrateurs.

Au quatrième jour c’est presqu’un désert que nous traversons, tant la campagne est peu habitée en direction de Rocamadour.
Bien qu’ayant un peu d’avance sur notre programme, on roule obstinément toute la journée, nez au vent et avalant une bonne ration dénivelé, contraints par les limites de nos provisions de parcourir plus de distance qu’à notre habitude. En chemin, les quelques villages qu’on traverse sont d’un pittoresque si authentique qu’ils nous font paraître bien artificielle la ville-musée de Saint-Cirq.

La journée se termine chez deux anciens cultivateurs, dans un sympathique camping à la ferme. Les installations sont restées dans le jus des années 70, ce qui n’est pas sans apporter aux lieux une atmosphère de simplicité et de convivialité. Attablés au soleil, on se délecte de notre dîner et de la vue sur les collines avoisinant le mamelon où on est perchés.

C’est sous une brume matinale qu’on découvre le lendemain le site de Rocamadour. Bien qu’elle ait constitué à une époque un lieu de pèlerinage majeur, je ne connaissais pas cette cité médiévale religieuse bâtie à flanc de roche. Elle nous apparaît nappée d’un certain mystère, sous cette lumière pourtant peu flatteuse. On l’explore jusqu’à l’heure où deviennent plus nombreux les touristes et marcheurs du chemin de Compostelle.

Avant de boucler la boucle, notre itinéraire de l’après-midi devait nous mener au gouffre de Padirac. Mais la météo annonce de la pluie pour les heures à venir, et on redoute d’être plongés à nouveau dans une ambiance touristique. On décide donc au lieu de ça de prendre un chemin plus court pour revenir à notre point de départ, via une ancienne voie ferrée qui nous permet de profiter allégrement d’un dernier tronçon de campagne quercinoise.
La pluie ne tombera finalement pas ce jour, et ces quelques heures d’avance nous permettent de préparer sereinement notre retour du lendemain. Les vacances à vélo, c’est parfois aussi rouler moins, pour ne pas avoir à se presser.

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Après cinq ans passés au Proche-Orient et en Amérique Centrale, je suis venu au vélo par intérêt pour le voyage. D’abord un tour en ma Bretagne natale, puis quelques équipées sur des terrains plus relevés, et bientôt je partais pour six mois de route entre Asie du Sud-Est et Asie Centrale.
Il m’est difficile à présent de concevoir un voyage sur un autre mode ; et pour toutes mes vacances ou presque, ainsi qu’un certain nombre de mes week-ends, je charge le matériel de camping pour une échappée vélocipédique au grand air, au pas de ma porte ou au bout du monde.

Informaticien à mes heures perdues, je suis également le développeur-éditeur-modérateur-dictateur de ce site, et du planificateur de voyages Talaria.

Enfin, ma dernière lubie en date est de fabriquer des vélos sur mesure.

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