Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1
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Douchanbé. On vient d'atterrir au Tadjikistan. C'était avant la crise sanitaire, qui met un frein aux pérégrinations internationales depuis deux ans.

Bientôt on s'engagera sur la fameuse “autoroute” du Pamir. C'est un itinéraire réputé pour ses paysages grandioses autant que pour sa difficulté, avec la traversée d'un haut-plateau désertique sur des pistes cahoteuses qui mettent à l'épreuve tant les cyclistes que leur matériel.

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

On appréhende un peu, mais il est trop tôt de toute façon pour nous y engager : il fait encore froid là-haut.
En attendant des températures plus clémentes, on a prévu une boucle en Ouzbékistan, pays voisin, qu'il vaut mieux quant à lui parcourir avant l'arrivée du mois de juin et des chaleurs plombantes.
(Pourquoi on n'a pas atterri directement en Ouzbékistan, c'est une autre histoire, bien compliquée…)
Tout autant qu'on est curieux de faire l'expérience de la haute montagne tadjike, on est impatients de découvrir les monuments ouzbeks et les villes mythiques Samarcande ou Boukhara.

Installés dans la très simple et sympathique pension de Zafar, on fait une petite révision des vélos avant de partir. Ce sont deux vieilles bécanes des années 90, taillées pour le voyage. On les avait achetés d'occasion il y a quelques années, avant notre première expérience de cyclo-camping, en notre Bretagne natale.
Depuis cette acquisition, et notamment en prévision de ce nouveau voyage, les vélos ont reçu pas mal de modifications : renouvellements de pièces usées et améliorations diverses. Mais essayant de nous en tenir à un budget raisonnable, on avait décidé de conserver notamment les porte-bagages d'origine. Bien qu'ils ne soient pas en acier chromoly – comme préconisé pour le voyage à vélo – ils ont déjà démontré leur robustesse et leur bonne facture sur les routes d'Europe et d'Asie du Sud-Est.
C'était sans compter celles d'Asie centrale…

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

C'est étonnant comme le réseau routier de la capitale tadjike est vétuste. Un kilomètre autour de l'hyper-centre, le tarmac est déjà criblé de nids de poules, quand les routes sont seulement goudronnées… Une promenade à la journée nous donne l'occasion de premières secousses.

On rallie l'Ouzbékistan par la vallée de Zeravchan. Malgré nos craintes, le passage de cette frontière redoutée se déroule avec une facilité déconcertante, et l'arrivée dans le pays est réjouissante. Les automobilistes Ouzbeks nous gratifient de coups de klaxon enthousiastes. Sitôt arrivés en ville un marchand de glace nous offre un cône à chacun, en guise de bienvenue. L'hospitalité et la générosité ouzbèques n'allaient pas être démenties de tout le séjour.

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

Samarcande nous éblouit par la splendeur de son patrimoine historique. Les monuments timourides sont fascinants.
On rencontre là d'autres cyclistes embarqués sur la Route de la Soie. Une chouette réunion s'organise dans un café de la ville.

Après quelques jours de visite, on prend la direction de Boukhara, autre bijou historique du pays. Le chemin le plus court, à travers les plaines arides, est celui qui offre la route la plus en état. C'est aussi celui que privilégient les automobilistes.
On emprunte donc une voie détournée, plus au Nord, par un itinéraire qui nous fait découvrir la simplicité de la vie campagnarde : les maisons maçonnées en briques de terre, les paysans souriants, et des paysages vallonnés. Notre premier bivouac dans le pays nous offre l'occasion de contempler les bergers rentrant leurs troupeaux, tandis que nous dînons face au soleil couchant.

Le lendemain, on compte rejoindre Nourata. C'est une étape un peu particulière, pour nous petits rouleurs, car pour la première fois on passera la barre symbolique des 100Km parcourus dans la journée.
Le thermomètre grimpe haut ce jour-là ; et un vent franc nous souffle au nez. La route est droite et moins stimulante que la veille. On a de la difficulté.
Les occasions de nous mettre à l'ombre sont rares. On profite d'un abri de bus pour nous accorder une petite pause goûter. Les vélos restent au soleil tandis qu'on souffle un peu sous notre abri de fortune.

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

Paf ! Quelque chose éclate. On ne tarde pas à découvrir que c'est une chambre à air, qui sans doute n'a pas supporté la chaleur.
Qu'à cela ne tienne, on n'en est pas à notre première crevaison. On décharge le vélo pour réparer. Mais au moment de le retourner, on réalise que le porte-bagages aussi est cassé.
À quel moment a-t-il rompu ? on ne saurait trop dire… Ce qui est certain c'est qu'avec un seul bras il ne supportera plus longtemps la charge. Surtout pas sur les pistes du Pamir…
Impossible a priori de trouver en Asie Centrale un nouveau porte-bagages assez robuste pour transporter sur des milliers de kilomètres tout le bardas de nos sacoches. Notre voyage sent le roussi…

Au prix de bien des efforts et de beaucoup de fatigue, on rallie finalement Nourata. Pour éviter une casse définitive, on a reporté autant de charge que possible sur le second vélo.
On se trouve une sympathique pension où nous installer posément, le temps de trouver une solution.

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

Il se trouve que notre hôte Ruslan a dans sa cour deux beaux vélos de randonnée. Il nous explique que ce sont deux touristes Néerlandais qui les lui ont offerts à l'issue de leur voyage, plutôt que de les ramener avec eux par avion.
L'occasion est trop belle. Ruslan voudrait-il nous vendre un porte-bagages ?
Hélas non. Les deux montures sont comme un trésor à ses yeux, qu'il ne peut se résoudre à altérer. Notre salut ne se trouve pas là.

Un porte-bagages en Asie centrale - Épisode 1

Un peu désespérés, on lance un appel de détresse aux amis de Samarcande. Sous leur influence, on avait fait notre entrée dans le monde moderne, en les rejoignant sur le réseau social par lequel ils communiquent et s'échangent de bons tuyaux.
On ose à peine y croire quand au bout de cinq minutes à peine quelqu'un répond : “Je prends l'avion de Paris pour Douchanbé dans deux semaines. Je peux vous amener un nouveau porte-bagages si vous voulez.”
Thibaut notre sauveur ! que nous ne connaissons pas encore. Un bref appel et les modalités de ce miracle sont arrangées. C'est à peine croyable. Le voyage va pouvoir continuer.

Reste qu'il serait dommage, pour les jours à venir et la suite de notre découverte de l'Ouzbékistan, de renoncer à notre mode de déplacement, qui nous apporte tellement de satisfaction.

Malgré un autre coup dur, l'ingéniosité et la générosité ouzbèkes allaient nous dépanner au-delà de nos espérances.

À suivre : Épisode 2

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Après cinq ans passés au Proche-Orient et en Amérique Centrale, je suis venu au vélo par intérêt pour le voyage. D’abord un tour en ma Bretagne natale, puis quelques équipées sur des terrains plus relevés, et bientôt je partais pour six mois de route entre Asie du Sud-Est et Asie Centrale.
Il m’est difficile à présent de concevoir un voyage sur un autre mode ; et pour toutes mes vacances ou presque, ainsi qu’un certain nombre de mes week-ends, je charge le matériel de camping pour une échappée vélocipédique au grand air, au pas de ma porte ou au bout du monde.

Informaticien à mes heures perdues, je suis également le développeur-éditeur-modérateur-dictateur de ce site, et du planificateur de voyages Talaria.

Enfin, ma dernière lubie en date est de fabriquer des vélos sur mesure.

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